Nicolas Sarkozy : Un intéressement pas si intéressant.

Publié le par Didier B

Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy est en déplacement à l’étranger, dans l’Oise. Il vient d’y annoncer un plan miracle destiné à multiplier par deux en 4 ans les montants affectés par les entreprises à l’intéressement. C'est une bonne petite mesure gaulliste qui fera plaisir aux membres de sa majorité qui ne le trouvent pas assez « généralesque ».
L’idée développée par le président et le gouvernement est que les entreprises doivent mieux répartir leurs bénéfices et ne plus autant favoriser leurs actionnaires au détriment de leurs salariés. Selon leurs théories, ceci permettra d’augmenter le pouvoir d’achat.

 

En 2005, les entreprises ont distribué 6 milliards d’euro à 4 millions de salariés grâce à l’intéressement et c’est donc à environ 12 milliards que Nicolas Sarkozy voudrait voir porté cette somme destinée aux salariés. Pour arriver à ce résultat, le président vient d’annoncer qu’un crédit d’impôt de 20% serait accordé aux entreprises qui participeraient au nouveau dispositif.

 

Bon, on ne va pas mégoter, 6 milliards de plus d’ici à 2012 pour les salariés, ça serait bien.
Première interrogation : 12 milliards pour combien de salariés ? Le double, le triple ? Annoncer un chiffre comme celui-ci ne représente rien si on ne le compare pas à ceux qui pourraient en bénéficier. Cela ressemble beaucoup à un effet d'annonce, non? Au-delà des sommes que les salariés pourraient toucher, concentrons nous sur l’intéressement qui présente des avantages pour les entreprises et des inconvénients pour les salariés et contribuables.

 

Le premier avantage pour les entreprises, c’est l’exonération de cotisations sociales (contrairement aux salaires). Mais le discours récurant de Sarkozy et du gouvernement est que le travail coûte trop cher en France ; une exonération « cachée » dans un cadeau aux salariés n’est donc par très surprenante.
Le second avantage est que l’intéressement n’est versé que si certains critères (négociés avec les CE ou les syndicats) sont remplis et est donc soumis à de l'aléatoire, contrairement à une augmentation de salaire qui est définitive. Si les entreprises présentent l’intéressement comme un élément de salaire supplémentaire , il n’est cependant pas versé systématiquement et les salariés ont tendance à l’oublier.
Il est donc à craindre que les entreprises privilégient l’intéressement aléatoire à une augmentation de salaire permanente. Mais, Madame Chabot, pourquoi les salariés devraient-ils craindre de gagner plus ?

 

Les inconvénients pour les salariés ne seront pas visibles immédiatement.
En effet, l’exonération de cotisations sociales sur des sommes considérables mettra un peu plus en danger les organismes de sécurité sociale. Si le seul moyen imaginé par le gouvernement pour augmenter le pouvoir d’achat les prive de sources de revenus, ils pourront sans problème être accusés de coûter trop d’argent par le gouvernement, et le dépeçage continuera… Par exemple, à un moment où le problème des retraites est au premier plan, comment peut on justifier de verser des rémunérations sans que les caisses de retraite en bénéficient ?
Autre inconvénient probable, la baisse des recettes fiscales de l’état et donc des possibilités d’action de ce même état vers les français. Le crédit d’impôt de 20% représente tout de même 1,2 milliards d’euros, qui ne rentreraient plus dans les caisses de l’état ; j’avais pourtant l’impression que l’état avait besoin d’argent.

 

Donc, il y a une carotte, le crédit d’impôt. Le bâton, parce qu’il y en a un, sera une loi qui obligera les entreprises d’associer leurs salariés aux bénéfices, en 2010. A voir, puisque ceci n’est qu’une vague promesse, et que le gouvernement est connu pour en faire beaucoup et ne pas les tenir (n’est ce pas, amis pêcheurs ?). En fait de bâton, le président aurait du prévoir des impôts plus importants sur la part des bénéfices versée aux actionnaires, avec effet immédiat ; ça aurait remis les pendules à l’heure.

 

Finalement, la plus grosse crainte que Nicolas Sarkozy doit avoir, c’est que les salariés utilisent l’intéressement comme un outil d’épargne. En effet, bloquées 5 ans, les sommes versées sont exonérées d’impôt sur le revenu. Pendant ce temps là, la consommation ne serait pas relancée et les recettes de l’état diminueraient d’autant et ce serait sa volonté d’être le « président du pouvoir d’achat » qui serait une nouvelle fois mise à mal.

 

Au total, cela fait beaucoup d’inconvénients et d’incertitudes pour une mesure « étudiée » pour donner un coup de pouce au pouvoir d’achat des français. A moins, bien sur, que l’annonce de cette mesure ne soit qu’un moyen pour Nicolas Sarkozy de paraître « social » et de tenter de redorer son blason alors qu’il n’a pour objectif que de défendre les intérêts de ses amis entrepreneurs et de leurs entreprises…

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M
L'augmentation de tous les salaires ne serait ni une mesure juste, ni une mesure acceptable économiquement. Et surtout elle dépend des entreprises et non du gouvernement. Un accord a été trouvé avec les fonctionnaires, pour ce qui dépend de l'Etat. Sarkozy prévoit d'inciter les entreprises à passer des accords salariaux avec leurs salariés, sous peine de voir leurs aides baisser.Comme toute mesure l'augmentation de l'intéressemenr a des inconvénients, mais c'est une excellente mesure, permettant de faire bénéficier les salariés des profits de l'entreprise. Le projet devrait permettre à davantage de salariés d'en bénéficier et de manière plus importante. Cette mesure, liée à la conditionnalité des aides, est une très bonne mesure tant sur un plan social qu'économique.
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O
Je suis aussi d'accord avec Rébus, car trés peu en bénéfie, de plus faut encore que les autres entreprises fasses des bénéfices pour reverser, les gagnantes encore une fois c'est les grosses qui vont encore gagner du pognon sur le crédit d'impôts et bien sur n'augmenteront pas les salaires, Sarko ne sait plus quoi faire pour remonter le pouvoir d'achat !!!
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D
@RébusExact. Actuellement, c'est 4 millions de salariés sur 23 millions au total (si ma memoire est bonne).
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R
Juste un effet d'annonce supplémentaire, l'intéressement n'intéresant finalment que peu de salariés, par contre, c'est encore un moyen de ne pas augmenter les alaires effectivement
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